PJ Budget wallon 2010
Intervention de M. Marc BOLLAND, Député-Bourgmestre – Séance publique 09/12/2009
Madame la présidente,
Monsieur le ministre,
Chers collègues,
Les débats budgétaires sont intéressants dans la mesure où ils permettent notamment de faire le point sur les actions menées, de valider les politiques futures, mais aussi de prendre un peu de recul par rapport aux aléas de l’actualité.
Ces dernières semaines, le monde agricole, particulièrement dans le cadre de la crise du lait, a été plongé dans l’urgence et le court terme.
Le gouvernement, via votre action Monsieur le Ministre, a pris des mesures importantes, notamment en matière de soutien des revenus des exploitations.
Je voudrais ici modestement attirer votre attention sur quelques points liés aux éléments suivants :
- l’inscription de plus en plus forte de notre agriculture dans une économie ouverte ;
- la nécessité de développer la valeur ajoutée du secteur ;
- la gestion des outils publics de soutien et de promotion ;
- enfin quelques réflexions issues des conclusions du Sommet mondial sur la sécurité alimentaire qui s’est tenu à Rome en novembre et dont nous avons très peu parlé, afin de situer notre réflexion et donc notre action dans une perspective de moyen et de long terme.
1 – l’inscription de plus en plus forte de notre agriculture dans une économie ouverte est un fait
Et dans une europe majoritairement dominée par les fidèles de l’idéologie capitaliste, ce n’est pas près de changer.
L’agriculture a besoin de stabilité et le moins que l’on puisse dire c’est que les marchés agricoles internationaux ne sont pas stables, de plus en plus ouverts à la spéculation mais aussi avec une demande et une offre en mouvement rapide.
Sur cet aspect des choses, Monsieur le Ministre, je formule 3 demandes précises :
- nous devons disposer d’outils d’analyse macro économiques.De façon évidente, le marché dysfonctionne totalement dans la chaîne producteur – distributeur – consommateur.
Il est stupéfiant de lire dans un rapport de la commission européenne, au début de la crise du lait, en juillet ,que même celle-ci constate un dysfonctionnement majeur du marché sur la régulation des prix et reconnait ne pas disposer des outils d’analyse suffisant.
Or, les règles européennes interdisent l’abus de position dominante. Clairement. Pour utiliser cette arme en faveur du secteur, il faut avoir des données dont nous ne disposons pas aujourd’hui..
Monsieur le Ministre, je vous demande instamment de prendre, avec votre collègue de l’économie, l’initiative de la mise en place d’outils de suivi macro économique des marchés, permettant d’identifier les nœuds de dysfonctionnement et de les combattre efficacement.
- nous devons peser davantage en amont des décisions européennes.Souvent, compte tenu de l’actualité économique, j’ai le sentiment que nous arrivons un peu comme les carabiniers d’Offenbach, quand les technocrates européens ont bien balisé toutes les décisions à prendre.
Monsieur le Ministre, je vous demande de mettre en place, comme l’ont fait nos voisins flamands, un outil de lobbying puissant au niveau européen, en collaboration avec le secteur.
- l’équilibre entre l’offre et la demande, c’est aussi une question de rapport de forces.J’ai constaté en commission que le budget prévu pour aider les groupements d’agriculteurs est en diminution. Vous m’avez répondu que c’est parce que il y a moins de demandes.
Je sais que vous êtes sensible à cet aspect des choses puisque c’est sur votre proposition que le gouvernement wallon a décidé d’une aide individuelle de 1.000 € dans le secteur du « lait wallon équitable » pour les agriculteurs qui rentrent dans un régime coopératif.
Monsieur le Ministre, je vous demande d’aller plus loin, et d’être plus pro actif : l’an prochain, nous devons constater que les demandes de soutien aux groupements agricoles ont augmenté. A vous de faire la promotion de l’idée, afin que les producteurs se regroupent et puissent ainsi rétablir quelque peu un équilibre dans la négociation des prix agricoles.
2 – la nécessité de développer la valeur ajoutée de notre agriculture
Sur ce plan, il faut de façon évidente intégrer la réflexion dans la dynamique du plan Marshall 2.Vert.afin de permettre aux entreprises agricoles de s’orienter vers les secteurs à plus forte valeur ajoutée, à diversifier leurs activités, à augmenter leur productivité, à trouver de nouveaux débouchés.
Dans ce contexte, Monsieur le Ministre, quelques questions :
- quand le contrat de gestion prévu par la DPR sera-t-il proposé au CRA W ? Le rôle de cet OIP (comme celui de la SRIW, active à un autre stade complémentaire et avec qui il faudrait augmenter le potentiel de synergies, me semble t il) est fondamental dans le développement du pôle agro alimentaire, un des axes majeurs du redéploiement économique de notre région.
- comment comptez-vous avec votre collègue Ministre de l’économie, promouvoir les possibilités de bourses de pré activité dans le secteur agricole, permettant une diversification des activités et une stabilisation des revenus ?
- où en est le plan « énergie agriculture » ?
- sous la dernière législature, il avait été évoqué un « facilitateur énergie » : où en est cette idée ?
3 – la gestion des outils publics de soutien et de promotion
Sur le plan individuel, la DPR mais aussi l’exposé général du budget des recettes et des dépenses de la région wallonne, insistent sur les délais de paiement des aides aux agriculteurs.
Je ne peux qu’encourager le gouvernement dans cette voie, c‘est très bien.
De la même manière, au travers du budget, le gouvernement met en œuvre sa volonté de synergies entre différents acteurs de soutien à la production. La volonté de synergie est une bonne chose.
Mais je m’interroge sur l’évolution de 2 organismes :
- l’OPW : pouvez vous garantir Monsieur le Ministre que tous les services de soutien aux producteurs développés depuis 30 ans par cet organisme seront maintenus ?
- l’APAQ W :
- Cet organisme a-t-il bien intégré les remarques de la cour des comptes quant à la gestion de sa gestion?
- Cet organisme met il bien en œuvre des techniques d’évaluation de l’impact de ses actions ? Je reste perplexe sur le budget 2010 qui manifestement n’intègre en rien une modification liée à une quelconque analyse des résultats antérieurs.Je souhaiterais une action plus rationnelle, notamment dans le cadre de l’action de « promotion générique des produits »
- Où en est la mise en place de la coordination avec l’AWEX pour la promotion de nos produits à l’international, coordination indispensable s’il en est?
- Le contrat de gestion prévu par la DPR est il en cours ? quand sera-t-il proposé à l’APAQ W ?
4 – le sommet mondial sur la sécurité alimentaire (Rome – novembre 2009)
Aujourd’hui, 1 milliard d’hommes et de femmes ont faim.
Aujourd’hui, un enfant meurt de la faim toutes les 6 secondes.
Ainsi, pendant cette intervention, plusieurs dizaines d’enfants sont morts de faim sur la planète.
C’est insupportable.
La souveraineté alimentaire, une mondialisation juste, humaine et durable, sont des principes inscrits dans la DPR.
Ces principes, ainsi que le renforcement de la solidarité internationale, sont rappelés dans l’ébauche de note de politique internationale reprise dans l’exposé général du budget que nous discutons aujourd’hui dans ce parlement.
Monsieur le Ministre, notre agriculture doit voir loin et relever son niveau d’ambition.
Ces objectifs politiques justes et généreux peuvent servir de vecteur à la réorganisation et au développement de notre agriculture.
Si aujourd’hui, nous sommes capables de développer un savoir faire reconnu dans l’équilibre à mettre en œuvre entre développement rural et développement économique, alors demain, nous pourrons faire en sorte que la crise alimentaire mondiale d’aujourd’hui soit une opportunité pour notre secteur agricole.
Pour nourrir la planète, la production mondiale doit augmenter de 70% d’ici 2050.
Voilà de grandes et belles perspectives, tant sur le plan économique que sur le plan humain.
Monsieur le Ministre, la DPR prévoit d’élaborer un décret cadre d’orientation agricole fixant les objectifs stratégiques à long terme de notre région pour notre agriculture.
Je ne doute pas que vous serez, comme toujours, très concret dans vos propositions.
Mais je souhaite aussi Monsieur le Ministre, que vous soyez ambitieux dans vos propositions : ambitieux sur les synergies avec les autres départements du gouvernement ; ambitieux sur la qualité des outils publics d’analyse des marchés, de soutien aux producteurs, de contrôle des marchés, ambitieux sur la contribution de notre agriculture aux grands enjeux mondiaux.
De grands et beaux chantiers en perspective qui peuvent faire l’honneur de notre région et de ses habitants.
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